Des avocats ont pris la défense de ces misérables pèlerins, le bâtonnier du barreau de Pau a réagi, en écrivant aux autorités. Mais l'évêque, à l'image de Pie X..., pape pour le moins silencieux au temps du nazisme, ne voit pas l'intérêt de réagir...
Extrait de l'article de Libération :
STÉPHANIE LACAZE Bordeaux, intérim
«Quand je suis arrivé dans les locaux de la PAF [police aux frontières, ndlr], j’ai vu cet homme, un Camerounais qui serrait précieusement ses bidons d’eau bénite autour de lui, dans sa geôle. Cela m’a serré le cœur.» Henri Moura se souvient avec émotion de cette affaire sur laquelle il est intervenu, en tant qu’avocat, il y a quelques années. Des cas comme celui-là, il continue d’en voir souvent. Trop souvent à son goût.
Expulsion. Lors de sa dernière permanence, cet avocat du barreau de Pau (Pyrénées-Atlantiques) a été appelé pour assister une Sénégalaise de 60 ans durant sa garde à vue. Cette femme atteinte d’une maladie grave, qui venait prier la vierge Marie à la grotte Massabielle, a été appréhendée dans le train entre Pau et Lourdes (Hautes-Pyrénées). Sa demande de titre de séjour est en cours d’instruction à la préfecture de Paris, mais pour avoir circulé sans papiers la sexagénaire risque purement et simplement l’expulsion.
La semaine dernière encore, deux Nigérianes et un Djiboutien ont été interpellés par les policiers alors qu’ils se rendaient en pèlerinage à Lourdes. «Nous sommes convaincus que la PAF pratique des contrôles systématiques et quotidiens sur cette ligne ferroviaire. C’est un bon moyen pour le préfet de faire du chiffre», assène Isabelle Casau, la responsable de l’équipe des treize avocats palois spécialisés dans le droit des étrangers. «C’est révoltant et complètement cynique. On ne mesure pas l’attrait que peut exercer Lourdes sur des catholiques majoritairement africains qui ont une foi très profonde. Ils sont prêts à prendre des risques pour effectuer leur pèlerinage», poursuit l’avocate.
Isabelle Casau et ses collègues interviennent chaque semaine auprès d’étrangers arrêtés dans ce train. Le bâtonnier de l’ordre des avocats de Pau, Jean-François Blanco, soutient leur démarche. Il y a deux semaines, il a adressé un courrier à l’évêque de Lourdes pour lui demander «d’intervenir auprès de monsieur le préfet des Pyrénées-Atlantiques afin que la croyance de ces malheureux étrangers soit respectée et qu’il renonce à ces arrestations». L’avocat considère que «l’Eglise a une obligation morale envers ces personnes et qu’elle leur doit une protection».
Jacques Perrier, l’évêque de Tarbes et de Lourdes, n’a pas encore répondu au bâtonnier. Mais une chose est d’ores et déjà acquise : l’ecclésiastique n’a pas l’intention d’accéder à la demande de Jean-François Blanco. «Que ce monsieur se saisisse de cette affaire, c’est très bien, et il est dans son rôle, reconnaît Jacques Perrier, mais si j’écris au préfet, il va me dire : "Mêlez-vous de vos oignons, monsieur l’évêque."»
Et le responsable des sanctuaires de préciser : «Dans le christianisme, le pèlerinage à Lourdes n’a pas la même signification que le pèlerinage à La Mecque pour les musulmans.» Il ne constitue, en aucun cas, une obligation pour les croyants, rappelle l’évêque.